Consommation : Pourquoi de plus en plus de grandes marques se lancent dans le marché de la seconde main

Pour répondre à un besoin de plus en plus fort de leur clientèle, de nombreuses marques françaises se sont elles aussi lancées dans la seconde main via des plateformes en ligne ou directement en boutique.Une manière de répondre à la demande des clients et de faire fructifier leur image. Si elles ne tirent pas (encore) de profit de cette nouvelle forme de vente écoresponsable, elles ont conscience de participer à l’évolution des comportements des consommateurs.

Les friperies et les plates-formes de dépôt-vente de prêt-à-porter comme Vinted ont littéralement cartonné après le confinement. Selon l’Observatoire Natixis Payments, le nombre d’achats d’articles de seconde main a augmenté de 140 % de 2019 à 2021, tout canal confondu. Sandro, Petit bateau, Aigle, Ba&sh, Bocage, Balzac, le Slip Français et même du luxe avec Isabel Marant : ils sont toujours plus nombreux à offrir à leurs clients un service de seconde main, en leur proposant de ramener des articles contre un bon d’achat. 20 Minutes vous emmène dans l’arrière-boutique, même dans les bureaux, pour mieux comprendre les ambitions des marques.

« La mode est souvent questionnée sur son trop fort impact environnemental », constate Pierre-François Le Louët, président de la Fédération française du prêt-à-porter féminin. C’est pourquoi de grandes marques françaises souhaitent donner un second souffle aux vêtements qui ont déjà été portés. C’est d’ailleurs comme cela qu’Aigle, marque de bottes, chaussures et de prêt-à-porter, a nommé son site web de seconde main, lancé en octobre 2020. Nadine Cottet est la directrice marketing de la marque. Pour elle, il s’agissait « d’un cheminement assez naturel, pour une marque engagée depuis sa création et qui vend des produits durables ». Le but ? « Sensibiliser les consommateurs à de nouveaux modes de consommation ».

« La seconde main, il faut y aller »

« Trop de vêtements dorment dans les armoires de Français », selon Pierre-François Le Louët, c’est aussi le cas des produits Petit Bateau. Delphine Lebas est la directrice RSE de la marque. « La durabilité, c’est dans l’ADN de Petit Bateau, affirme-t-elle. Travailler dans le textile, c’est prendre ses responsabilités et accompagner une transformation du modèle de vente ». Elle fait le parallèle avec l’arrivée d’Internet. « Avant, on regardait le digital et on se demandait ce que ça allait donner. Aujourd’hui, tout le monde s’en sert. La seconde main, c’est pareil, il faut y aller ». Un concept donc très prometteur, à en croire Mathilde Lespets, chargée de projet innovation et développement durable à la Fédération de la Maille, de la Lingerie et du Balnéaire. Selon elle, « le marché de la seconde main va vite dépasser le marché du vêtement neuf ».

Vendre et acheter un produit qui a déjà vécu, c’est aussi minimiser l’impact sur les ressources qui sont normalement sollicitées, notamment l’eau, le carbone ou les matières premières. Mais se pose la question de la livraison. En effet, une majorité de marques qui proposent de la seconde main, le font via un e-shop. Ont-elles trouvé ou imaginé des solutions pour adoucir les incidences sur l’environnement ? C’est une question qui se pose chez Aigle, qui se défend en affirmant ne travailler qu’avec Colissimo, « dont l’empreinte carbone est nulle ». Nadine Cottet poursuit en émettant un souhait à plus long terme qui serait de « compenser le transport avec Inuk », société qui promet aux entreprises de réduire leurs émissions carbones grâce aux énergies renouvelables. Les efforts sont plus timides chez Sandro, qui utilise tout de même « un packaging minimaliste avec du carton recyclé et recyclable » ainsi que « la livraison en point relais au lieu de la livraison à domicile », selon Khalida Chami, directrice RSE chez Sandro.

Ecolo… Jusqu’au bout du fil ?

Petit Bateau, qui lui en revanche propose son service de seconde main dans trois boutiques, a adopté le « downcycling », c’est-à-dire le fait d’utiliser les fibres des vêtements dans la fabrication d’isolants pour les habitations. Delphine Lebas évoque également un deuxième procédé écoresponsable : « Un de nos véritables enjeux pour demain, c’est de fermer la boucle de l’économie circulaire en démembrant nos produits, en les retransformant en fibre, en fil, puis en produit Petit Bateau », appelé le ” textile-to-textile “. Elle conclut : « Nous sommes même engagés dans le projet européen de mode circulaire SCIRT, dont Décathlon fait également partie ».

Si les marques répondent à un besoin de leurs clients, la seconde main a d’autres avantages. « On propose ces articles pour faire plaisir à notre clientèle, pour leur donner une seconde vie et aussi les rendre plus accessibles aux gens qui n’ont pas forcément les moyens », rapporte Nadine Cottet. Elle est également un gage de qualité. « Il s’agit d’une vraie demande de nos clients, puisque ce sont eux qui se passent les vêtements de mains en mains, de génération en génération, explique Delphine Lebas. Ce sont eux qui nous disent que nos produits ont une vraie durée dans le temps » .

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« Il s’agit d’une vraie demande de nos clients »

Par ailleurs conscientes de devoir de donner la meilleure expérience client à travers ce concept récent, l’aide de prestataires s’impose pour les marques. Tant dans le contrôle qualité des produits rapportés que dans les formalités. Aigle, Le Slip Français, Balzac et Sandro travaillent notamment avec Faume, entreprise française créée il y a un an et demi. « On les a formés sur les produits, nous avons établi un cahier des charges avec eux », détaille Khalida Chami. Freepry, une autre entreprise française, elle aussi créée il y a un an et demi, « travaille avec Petit bateau pour optimiser les ventes de ses articles de seconde en magasin », rapporte Mathilde Lespets, chargée de projet innovation et développement durable à la Fédération de la Maille, de la Lingerie et du Balnéaire.

Côté profit, Pierre-François Le Louët assure que « tout n’est pas drivé par le business « et que » les marques ne sont pas beaucoup d’argent ». « Elles se font environ 20-25 % de marge », souligne-t-il. Concernant les marques que 20 Minutes a contactées, il est plutôt question de marge nulle. Nadine Cottet précise qu’il ne s’agit pas d’un « objectif de rentabilité ». Quant à Khalida Chami, elle affirme que son équipe « n’image pas à court terme que ce soit une source de revenu ». En revanche, si un article de seconde main en particulier se vend très bien, Le Louët n’exclut pas que les marques veuillent à l’avenir se faire une marge (plus grande) et qu’ils « augmentent le prix de seconde main à l’avenir, et donc aussi le prix du neuf ».

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