Les salles de consommation à moindre risque, ou “salles de shoot“, permettraient-elles de réduire les risques sanitaires liés à la consommation de drogues injectables ? D’autres effets positifs sont-ils possibles ? Afin de répondre à ces questions, le Conseil de Paris a voté hier soir une subvention de 27 000 euros pour l’association Elus, Santé Publique et territoires (EPST), à l’initiative de Jean-Marie Le Guen, député socialiste et médecin. Une initiative qui a le mérite de relancer le débat sur ce type de salles qui existent déjà dans de nombreux pays : 80 sont déjà ouvertes dans le monde, dont 31 au Pays-Bas, 20 en Allemagne et 17 en Suisse.
Les “salles de consommation contrôlée à moindres risques“ permettent aux personnes toxicomanes de pouvoir absorber leur propre drogue avec un matériel gratuit (seringues, pipes à crack, voire paille à cocaïne). Cette absorption est encadrée par du personnel médical, ce qui devrait permettre de réduire les risques de contamination par le
virus du sida, de l’
hépatite B ou C, principales maladies virales transmissibles par le sang. Aujourd’hui, près de 60 % des usagers de drogues sont infectés par le virus de l’
hépatite C et environ un tiers d’entre eux l’ignorent.
Outre la possibilité de réduire les contaminations, de telles salles permettraient également d’inciter les personnes toxicomanes à se faire prendre en charge sur le plan thérapeutique, comme l’espère Jean-Marie Le Guen, dont les propos sont rapportés
par le site de la Ville de Paris : “dans ces salles, on peut mettre [les personnes toxicomanes] dans un environnement sécurisé, établir un premier contact et essayer de les faire rentrer dans les circuits de soins et de prévention qui existent“. Par ailleurs, ces structures pourraient diminuer la fréquence de shoots réalisés dans la rue ou dans les cages d’escaliers, source de nuisance pour les riverains de certains quartiers, à Paris et ailleurs.
Cette mission d’évaluation consistera dans un premier temps à pratiquer une analyse comparative pour évaluer la pertinence, l’efficacité des salles existantes dans d’autres pays. Un séminaire d’experts sera également organisé, ainsi que des échanges avec les habitants des quartiers dans lesquels a été constatée la prise de drogues dans la rue. Pour cela,
l’ESPT pourra s’appuyer sur d’autres collectivités afin de restituer des données les plus représentatives possibles (Paris, Marseille, Lyon, Lille et le conseil général de la Seine-Saint-Denis).
De son côté, l’association Asud (Auto Support des Usagers de Drogues) souligne que la ministre de la santé ne paraît pas opposée à un tel dispositif. Roselyne Bachelot, interrogée par Michel Heimrich, député UMP, en commission à l’Assemblée Nationale le 4 octobre 2009, a en effet envisagé l’ouverture de telles salles en France, sous conditions : “la décision d’ouvrir ou non, à titre expérimental, une salle de consommation sera prise au vu des conclusions d’une enquête collective que conduit l’INSERM sur la réduction des risques chez les usagers“. Des conclusions “qui sont attendues pour la fin du premier trimestre de 2010“.
Cependant, Etienne Apaire, président de la Mildt, émet un bémol dans le Monde du 14 décembre, affirmant ne pas “chercher à accompagner les usagers, mais à les sortir de la drogue“ et soulignant l’absence d’études démontrant un effet positif de ces salles. Néanmoins, la conjonction de l’étude d’expertise de l’ESPT et de l’enquête collective de l’Inserm devrait pallier ce grief. Si les résultats de ces études sont positifs, ils pourraient déboucher sur l’ouverture de salles de consommation en France. Cette initiative guidée par la santé publique apparaîtrait pour le moins innovante alors que les récentes communications gouvernementales sur les drogues ont mis la répression en avant, notamment
dans la dernière campagne de la Mildt. Un stratégie qui a montré ses limites depuis plusieurs décennies…
Jean-Philippe Rivière
Sources : – “Une salle de consommation pour toxicomanes bientôt à Paris ?“, Paris.fr, 15 décembre 2009,
accessible en ligne – “Salle de consommation, Roselyne Bachelot dit oui, si….“, Asud.org, 6 novembre 2009,
accessible en ligne – “Toxicomanie : le gouvernement ne veut pas de “salles de shoot““, Lemonde.fr, 14 décembre 2009,
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